L’encadrement est-il toujours nécessaire ? Quels sont ses objectifs ? Comment le choisir et trouver des solutions d’encadrement économiques ? Après l’acquisition d’une oeuvre, se posent les questions de sa place chez vous, de sa mise en valeur et de sa conservation. La question de l’encadrement, s’il n’a pas été prévu en amont, va se poser. Il permet au collectionneur la mise en valeur, la conservation et l’appropriation personnelle. Artistes Actuels vous livre six secrets pour préserver et sublimer vos oeuvres d’art sans vous tromper et sans vous ruiner.
Un encadrement est-il vraiment toujours nécessaire pour vos tableaux et photos ?
La question de l’encadrement se pose en fonction du sujet (photo, estampe, gravure, peinture sur papier, sur bois, sur métal, dessin, huile sur toile, objets tels que les éventails, médailles, figurines, mais aussi les étoffes, vêtements, bijoux, les lettres, documents…) et certains sujets ne nécessitent en effet pas d’encadrement.
C’est ainsi le cas des toiles sur châssis ou des peintures sur bois. Souvent, le cadre habille et finit une œuvre pour cacher la tranche ou les bords mais il n’est pas absolument nécessaire. Il peut certes mettre en valeur l’œuvre mais je trouve qu’une grande toile est souvent très belle sans encadrement !
Par ailleurs, lorsque les bords de l’œuvre font partie intégrante de l’œuvre (bords papier artisanal, éléments de l’œuvre qui débordent des limites de l’œuvre…), les bords ne doivent alors pas être masqués par un cadre.
Il y a également les œuvres pour lesquelles l’artiste a conçu un cadre comme une partie de l’œuvre. Dans ce cas, on prend l’œuvre comme telle… ou pas. Changer le cadre serait indéniablement altérer l’œuvre.
Se pose également la question de l’encadrement des œuvres de petite valeur économique. Faut-il dépenser plus que la valeur de l’œuvre dans un encadrement ? En réalité, la valeur artistique, sentimentale ou émotionnelle d’une œuvre justifie à elle seule un encadrement et il y aussi des solutions économiques dont nous parlerons.
Sujet photo 1 : assemblage de métal peint sur couvercle zinc de ruche (œuvre d’Alain Signori), on peut envisager un cadre en caisse américaine ou laisser l’œuvre brute pour apprécier la profondeur du support
Sujet photos 2 et 3 : assemblage de bois flottés (fossilisés par l’eau de mer) avec soit un cadre réalisé par l’artiste, soit l’absence de cadre renforce la pertinence du sujet (œuvres de Marc Bourlier)
Sujet photos 4 et 5 : Peinture à l’huile sur toile sur châssis (œuvre de Paul Laufer). Un cadre serait superflu et risquerait de masquer la tranche profonde peinte en jaune qui donne un effet particulier à l’œuvre voulu par l’artiste
Quels sont les objectifs de l'encadrement ?
Bien souvent, l’amateur d’art cherche avant tout la mise en valeur de l’œuvre alors qu’il ne faut jamais perdre de vue que l’objectif premier d’un encadrement est de préserver pour assurer la pérennité et la transmission de l’œuvre.
L’encadrement est ainsi indispensable pour des sujets papier, textile ou non vernis afin de les protéger contre la poussière, les insectes, la graisse, l’humidité, les UV… bref de tout ce que contient l’air pouvant altérer le sujet.
Aussi, si vous aimez les cadres ou si vous cherchez à intégrer une œuvre dans votre environnement de vie, ne perdez jamais de vue ce premier objectif !
La préservation passe par :
- Du matériel et des colles au PH neutre (c’est-à-dire non acide)
- Par un sous-verre fermé hermétiquement avec de bonnes finitions au dos
- Par un verre anti-UV et anti-reflet. Il faut savoir qu’un bon anti-UV & anti-reflet assure une bonne lecture de l’œuvre et arrête plus de 90% des UV qui sont les ennemis de la durabilité de l’œuvre. Ces verres sont commercialisés depuis 15 ans. Un encadrement plus ancien ne possède pas ces caractéristiques et il y a encore des encadreurs « à l’ancienne » qui ne les proposent toujours pas, ce qui finalement est un bon critère de sélection de son encadreur !
Un sous-verre à pinces n’assurera qu’une préservation éphémère alors qu’un bon encadrement aura plus d’une cinquantaine d’années de durabilité.
Sujet photo 1 : Papier ancien (impression à l’encre sur papier d’emballage), encadrement verre anti-UV & anti-reflet (verre de devant) avec bordé papier. Le meilleur exemple de l’intervention minimale sur le sujet (Travaux de l’atelier Stéphanie Dumas à Versailles)
Sujet photos 2 et 3 : Aquarelle contemporaine sur carte de 1923, vue de face, vue de dos avec papier peint main réalisé par l’artisan encadreur (Marcoleptique)
Comment bien choisir son encadreur ?
Pour choisir un bon artisan pâtissier, il suffit de goûter… mais comment évaluer un artisan encadreur ? j’ai pour ma part 5 critères pour choisir un bon encadreur.
Critère 1 : Sa formation et son parcours. Le CAP encadreur est un diplôme d’État très exigeant. C’est un bon point même s’il y a de bons encadreurs non diplômés. En discutant avec un encadreur, je découvre son parcours et pour qui il travaille ou a travaillé. Des particuliers, des galeries, des musées… cela m’aide à définir s’il elle ou il est solide.
Le métier d’encadreur vous intéresse ? Vous recherchez un encadreur ?
Voir le site de l’INMA et son annuaire : https://www.institut-metiersdart.org/metiers-art/fiches-metiers/ameublement-et-decoration/encadreur https://www.annuaire-metiersdart.com/
source: capture d’écran du site de l’INMA
Critère 2 : Le respect pour l’œuvre.
Un bon encadreur intervient le moins possible sur les œuvres, et toute intervention doit être 100% réversible et ne jamais altérer l’œuvre : grâce à des adhésifs au PH neutre, à l’utilisation de points de couture pour fixer certains objets…
Sa façon de manipuler et d’entreposer les œuvres que vous allez lui confier sont aussi des points importants. J’y attache une très grande importance.
Sujet photo 1 et 2 : Boîte à éventail réalisée en cartonnage avec pied chevalet, bordé papier, verre anti-UV (éventail de petite fille fin XIX). L’éventail est fixé par 4 points de couture au fil nylon presque imperceptibles. (Travail réalisé par l’Atelier Stéphanie Dumas Versailles)
Critère 3 : Sa connaissance des courants artistiques, des papiers, des techniques (comme le fait de proposer ou non du verre anti-UV).
Sa connaissance déterminera sa capacité d’écoute et de conseils, sa réactivité et sa capacité à évaluer les goûts des clients pour y répondre ou les devancer, ainsi que sa capacité à proposer des idées si le client n’en a pas. Je fuis les encadreurs qui ne travaillent que dans un style d’œuvre et ne proposent que des solutions formatées et classiques.
Critère 4 : Proportion et poids.
Une des erreurs les plus fréquentes est lorsque l’encadrement écrase l’œuvre par sa taille, son volume ou tout simplement la couleur. Je crois sincèrement qu’un bon encadreur ne doit pas se prendre pour un artiste et avoir suffisamment d’humilité pour s’effacer devant l’œuvre. Cependant il est possible de réaliser un encadrement chargé par rapport à l’œuvre si cela permet de sublimer le sujet (pour cela, il faut vraiment avoir confiance et bien choisir son encadreur) :
Ici, les cadres ouvragés et plongeants guident le regard…
Sujet photo 1 : acrylique sur photo ancienne (Laudac) dans un gros cadre ancien ouvragé et plongeant. On distingue 4 cadres successifs.
Sujet photo 2 : peinture à l’huile sur bois 1820 (anonyme), cadre bois doré à reliefs prononcés d’époque qui donnent de la profondeur au sujet. Le cadre est très présent, il accentue la plongée vers le médaillon du sujet.
Sujet photo 3 : gravure XVIII, encadrement biseau double doré avec marge à filets, verre anti-UV (travail de l’atelier Stéphanie Dumas)
Critère 5 : Ce que l’encadreur met en avant.
Dans la boutique de l’encadreur, ce qui est exposé doit être soigné et doit montrer la constante recherche du détail : pas de traces sur les verres, une belle finition des angles de passe-partout… Toutefois, si le coup d’œil sur la boutique est important, je sais par expérience qu’il ne suffit pas car je ne perds jamais de vue qu’il est trop impacté par la situation géographique, le type de clientèles, les moyens de l’artisan… et je sais qu’il est compliqué d’avoir une jolie boutique et de la renouveler tout en travaillant.
D’une façon générale, ce que je fais est de regarder les encadrements que l’artisan expose ou sur lesquels il travaille (n’hésitez pas à demander à voir ce qu’il est en train de réaliser).
Si cette étape est validée, alors je le teste sur un travail de faible valeur.
C’est comme regarder les pâtisseries puis en goûter une petite avant d’acheter le gâteau d’anniversaire pour 6 personnes ! Un anniversaire, c’est important !
Comment encadrer une œuvre d’art : les règles de l’art à connaître absolument
Respecter l'oeuvre et écarter les effets de mode
D’une façon générale, je me méfie des effets de mode sur les couleurs et les matériaux : comme l’encadrement est là pour conserver et mettre en valeur, il est un investissement de long terme donc mieux vaut être sûr de pouvoir vivre longtemps avec. L’encadrement supportera-t’il le changement des modes ou vos déménagements ? Ainsi, sur les couleurs de passe-partout, dans 90% des cas je n’opte que pour le blanc et toutes ses variations (cassé, crème…)
Je considère également que l’œuvre doit être encadrée pour ce qu’elle est, et non pour s’associer au décor de son intérieur. Le mieux est de toujours tirer parti des caractères de l’œuvre. Ainsi, une œuvre bosselée ou qui n’est pas d’équerre mérite un encadrement brut ou /et simple qui ne cherche surtout pas à supprimer ces caractéristiques.
Sujet photos 1 et 2 : peinture acrylique sur métal gondolé aux bords irréguliers (œuvres de Patricorel). Sur la photo 1 : caisse hermétique avec verre anti-UV, cadre bois naturel teinté à l’encre de Chine, chacun des neuf sujets repose sur un support carton de 0,5cm pour rehausser et créer effet flottant. (Travail de l’atelier Stéphanie Dumas)
Sur la photo 2, avec une caisse sans verre, on ne garde que l’effet bosselé mais on perd l’effet bords irréguliers, le sujet est enfermé malgré réalisation artisanale de qualité qui conserve un aspect brut.
D’une façon générale, il faut éviter d’en faire trop.
L’encadrement ne doit pas détourner le regard de l’œuvre. L’encadrement ne doit pas entrer en conflit ou en concurrence avec l’œuvre, il doit être fonction de la taille du sujet.
De même, la taille du passe-partout, son épaisseur (pour cerner ou créer de la profondeur) avec un biseau plus ou moins profond, le choix de la baguette… doivent amener le regard vers le sujet. Un très bon artisan jouera avec les nuances des coloris de papier et de baguettes, avec l’utilisation des patines… en toute discrétion et subtilité.
Un cadre chargé ne sera pertinent que si l’œuvre le supporte. Et souvent, il s’agit d’une grande toile qui n’a même pas besoin d’encadrement !
Encadrement des oeuvres : Et la dorure dans tout ça ?
La dorure n’ajoute pas une couleur mais de la lumière, un reflet ou quelque chose de chaud et d’englobant. Comme l’’important est de ne rien ajouter par rapport à l’impact visuel créé par l’artiste, il faut rester dans la logique de l’œuvre.
La toile ne nécessite pas réellement de cadre. Les bordures de la toile ont vieilli sans être dégradées. Le choix de l’encadrer permet d’éviter le contraste entre un sujet intacte et des bords usés faute de protection pendant de nombreuses années. Le cadre moderne est simple et or patiné afin de cerner juste la toile
Si l’or est chaud, l’aluminium et l’argenté sont-ils froids ?
Ils sont surtout plus modernes voire contemporains ou industriels (dans un sens non péjoratif) mais peuvent tout à fait sublimer l’ancien avec une belle patine.
Pourquoi encadrer les photographies ?
La photo mérite absolument d’être protégée des effets à long terme de la lumière. La première règle à suivre est que le verre ne doit pas toucher la photo.
Un cadre baguette est souvent une bonne solution mais le bordé-papier en est une autre que j’aime bien. Il s’avère fin et discret tout en habillant. Le papier peut être teinté, il y a une infinie palette de teintes.
Ne pas trop cerner, laisser respirer (surtout pour une photo en mouvement) sont les lignes directrices. Le bordé-papier n’est pas marqué sur le plan stylistique et permet de multiples possibilités de mises en scène et d’accrochages pour les photos ou les papiers.
L’impression sur aluminium Dibond d’un tirage, avec un traitement de la surface permet la caisse américaine pour un rendu sobre et élégant.
Bien évaluer le coût d'un bon encadrement
L’encadrement doit être considéré comme un investissement de long terme. Son prix sera fonction du format, des types de montages, de la qualité du verre (choisir de préférence un anti-UV sauf pour un accrochage dans une partie sans lumière directe), des types de moulures et du montage (baguette coupée assemblée ou « cadre à coins rebouchés » c’est-à-dire fabriqué spécialement sur mesure et revêtus ensuite). Les cadres sur mesure à coins rebouchés sont chers mais exceptionnels sur le plan esthétique.
Cadres réalisés à partir de baquettes découpées et assemblées (de l’ancien au contemporain)
Pour avoir un prix, il faut impérativement demander un devis qui prend en compte le temps et le coût des fournitures.
N’hésitez pas à faire jouer la concurrence… sur les prix mais également sur les propositions de préservation et de mise en valeur. Au final des économies de 30% ou plus sont souvent possibles.
Sachez enfin qu’il est impossible pour un artisan de donner une fourchette de prix sans voir l’œuvre à priori (par téléphone par exemple), ou alors il vous ment !
Comment trouver des solutions d'encadrement économiques ?
Avec les cadres de seconde main
Il est en effet possible de réaliser un encadrement à partir de cadres anciens. Un bon artisan sait réutiliser des cadres anciens ou d’occasion pour faire un montage hermétique et beau. Vous pouvez évidement venir avec un cadre que vous avez chiné parfois pour quelques euros. Même si les dimensions ne sont pas les bonnes, l’artisan se chargera de recouper sauf si le cadre est trop abimé. C’est souvent une façon plus économique que de choisir des baguettes neuves… si vous aimez chiner, ce qui est mon cas !
L’important est que l’encadreur vous fasse une boîte hermétique, ensuite les baguettes d’encadrement sont amovibles, donc peuvent être changées sans altérer le coffrage.
Quelle différence entre encadrement standard et sur mesure ?
Pour ce qui est des cadres tout-fait achetés en grande surface ou en magasin de bricolage, ce peut être une bonne solution… mais à condition qu’elle soit temporaire ! C’est en effet une solution pratique de court terme qui permet d’attendre un encadrement plus professionnel. Pourquoi temporaire ? Parce-qu’ils ont plusieurs défauts :
- Les agrafes pliables ne permettent pas de fermer les cadres de façon hermétique
- L’apparence « bois » n’est pas du bois mais de la sciure de bois compressée avec de la colle recouverte d’un film plastique ou sérigraphié. Cela signifie acidité des matériaux.
- Le fond isorel est en sciure de bois compressée, également acide
- Le verre n’est pas toujours de bonne qualité sauf à payer cher ce qui n’est pas une bonne idée quand il s’agit d’une solution non pérenne
- L’ensemble est peu solide et peu durable et peut endommager l’œuvre au bout de quelques années
Donc, pratique à court terme, l’encadrement tout-fait ne permet pas la préservation de l’œuvre contre l’humidité et contre la lumière. Et de surcroît, malheureusement, vous participez à l’hyper consommation productrice de déchets et de non qualité.
Si vous avez une œuvre à laquelle vous tenez et pas le budget pour la protéger, alors encadrez-la avec un encadrement tout fait et faites vous offrir un encadrement par un artisan pour votre anniversaire ou pour Noël !
La rédaction
Plaisir et émotion des découvertes artistiques